Ne t'inquiète pas, t'as rien perdu !!
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Vovonne
Invité- Invité
- Message n°101
Re: Vovonne
Hé p'tit lutin facétieux, Vovonne elle est comme Pondy, elle ne sait pas insérer des photos.
Ne t'inquiète pas, t'as rien perdu !!
Ne t'inquiète pas, t'as rien perdu !!
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°102
Re: Vovonne
Bonjour Vovonne,
Tu vois, y'en a toujours à raconter sur sa vie, ses souvenirs, ses voisins, sa famille.... et tes nouvelles sont toujours savoureuses !
Si tu savais comme j'ai pensé à toi pendant les vacances, la chance que tu as de vivre tranquillement ta vieillesse auprès de ton homme malgré les quelques douleurs.... tu en parleras avec Pondy, elle sait elle, elle qui a été auprès de tous ces petits vieux obligés de survivre... Que c'est douloureux pour eux et leur entourage !
Je vous embrasse toutes les deux et à très vite !
PS : j'aurais bien fait comme toi Pondy de ne pas commencer avec les photos ! c'est galère ! pour continuer l'Ecosse il faut du temps !!
Tu vois, y'en a toujours à raconter sur sa vie, ses souvenirs, ses voisins, sa famille.... et tes nouvelles sont toujours savoureuses !
Si tu savais comme j'ai pensé à toi pendant les vacances, la chance que tu as de vivre tranquillement ta vieillesse auprès de ton homme malgré les quelques douleurs.... tu en parleras avec Pondy, elle sait elle, elle qui a été auprès de tous ces petits vieux obligés de survivre... Que c'est douloureux pour eux et leur entourage !
Je vous embrasse toutes les deux et à très vite !
PS : j'aurais bien fait comme toi Pondy de ne pas commencer avec les photos ! c'est galère ! pour continuer l'Ecosse il faut du temps !!
Invité- Invité
- Message n°103
Re: Vovonne
Question empathie, Mamina, j'étais là cet été
Question pudeur,Mamina, je me suis tue.
Question pudeur,Mamina, je me suis tue.
Vovonne- Invité
- Message n°104
Re: Vovonne
Hier, Je suis allée à la brocante du bourg.
Félix, ça lui plait pas de poireauter derrière les tréteaux couverts de nos vieilleries, j’ai tout chargé dans ma voiture et dès potron-minet j’avais étalé mon drap sur la planche.
On a bu le café dans des gobelets en plastique tout mous qui menacent de déborder si on boit trop vigoureusement.
Chacun apporte sa thermos et des biscuits, c’est l’habitude. A midi, l’un garde le stand et on va manger une andouillette grillée avec un petit verre de blanc frais.
On a eu de la chance, le ciel avait la couleur de la sainte-vierge.
Et du monde toute la journée, encore des hollandais pas rentrés chez eux et des parisiens en pagaille.
J’ai gagné 87 euros moins les 6 euros donné à la mairie quand j’ai réservé ma place, la 78. Une bonne place, pas au fond du champ et pas au début non plus. Trois euros du mètre, cette année c’est le nouveau tarif, ça a un peu augmenté, comme le gaz.
J’avais vue sur l’étang et j’étais à côté de celui qui vend les vieux bouquins qui sentent le moisi.
J’ai trouvé pour Félix un immense magazine de 1947 « France Illustration, salon de l’automobile »
A l’époque, il coutait 300 francs, c’est marqué sur la tranche. Emile, lui, il me l’a donné, faut dire qu’on s’connait bien tous les deux.
Alors, je disais qu’il y avait de la foule, les derniers vacanciers en quelque sorte. Les gens ils aiment les brocantes et les vides greniers. Moi, je vendais tout à 1 euro, sans marchandage.
Sauf quand c’est très tôt et que ce sont les brocanteurs professionnels qui passent, là, je brade rien.
L’année dernière, je me suis fait avoir. J’ai laissé des coupelles dépareillées pour 1 euro et l’autre là, il les a revendu sur son stand à 5 euros. Non de nom, j’étais furieuse. Je bouffeuillais encore plus que les vieilles qui claquent du dentier. Maintenant je les tiens au bout de l’œil les brocanteurs.
Cette année, j’ai débarrassé le grenier, ça fait du bien, j’ai réussi à atteindre le fenestron tabatière.
Des années que les rayons de soleil chahutaient les toiles d’araignées et des années que je voulais mettre un coup de chiffon. C’est fait mais quel boulot de tirer les paniers, les valises en carton bouilli. Je les vends pas celles-là même si tout le monde en veut.
J’ai bagoté des heures sous les fermes empoussiérées. Quand le temps vous saute au visage, il s’y accroche et j’allais d’un bout à l’autre du grenier tenant une vieille lettre, regardant une carte postale avec des remontées de jeunesse aussi acides que de la bile.
J’ai mis dans un panier plein d’objets de rebut, des cafetières cabossées, des pipes éculées, des sabots fendillés, des poêles à marron au manche calciné, des chaussures, des ceintures que ma belle fille appelle vintage. Un plein panier à linge.
Tout vendu j’vous dis.
Emile, lui, y disait : « mais Vovonne, tu pourrais en tirer bien plus, laisse-moi faire »
Non, moi ça m’amuse de vendre 1 euro et ça m’amuse encore plus de bavarder avec les acheteurs qui n’en reviennent pas de leur bonne fortune et qui du coup s’attardent.
Y’a le hollandais du village pas loin du nôtre qui chine sur chaque brocante pour acheter de l’authentique. Qu’est-ce qu’il doit accumuler comme cochonnerie. Il a accroché une paire de sabots qu’il a verni de frais à droite de sa porte d’entrée. On voit qu’il a jamais crapahuté dans les chemins de rosée celui-là.
Je suis rentrée fourbue et contente de ma journée, mon taiseux de Félix briquait son Fergusson.
Lui aussi était content de mon « France-illustration », du coup, il a pas fait son polât et pendant que je comptais mes pièces à la table , il feuilletait son magazine.
On a fermé la porte. Ca sent la fin de l’été, faisait déjà trop frais pour laisser la soirée se glisser dans la cuisine.
Félix, ça lui plait pas de poireauter derrière les tréteaux couverts de nos vieilleries, j’ai tout chargé dans ma voiture et dès potron-minet j’avais étalé mon drap sur la planche.
On a bu le café dans des gobelets en plastique tout mous qui menacent de déborder si on boit trop vigoureusement.
Chacun apporte sa thermos et des biscuits, c’est l’habitude. A midi, l’un garde le stand et on va manger une andouillette grillée avec un petit verre de blanc frais.
On a eu de la chance, le ciel avait la couleur de la sainte-vierge.
Et du monde toute la journée, encore des hollandais pas rentrés chez eux et des parisiens en pagaille.
J’ai gagné 87 euros moins les 6 euros donné à la mairie quand j’ai réservé ma place, la 78. Une bonne place, pas au fond du champ et pas au début non plus. Trois euros du mètre, cette année c’est le nouveau tarif, ça a un peu augmenté, comme le gaz.
J’avais vue sur l’étang et j’étais à côté de celui qui vend les vieux bouquins qui sentent le moisi.
J’ai trouvé pour Félix un immense magazine de 1947 « France Illustration, salon de l’automobile »
A l’époque, il coutait 300 francs, c’est marqué sur la tranche. Emile, lui, il me l’a donné, faut dire qu’on s’connait bien tous les deux.
Alors, je disais qu’il y avait de la foule, les derniers vacanciers en quelque sorte. Les gens ils aiment les brocantes et les vides greniers. Moi, je vendais tout à 1 euro, sans marchandage.
Sauf quand c’est très tôt et que ce sont les brocanteurs professionnels qui passent, là, je brade rien.
L’année dernière, je me suis fait avoir. J’ai laissé des coupelles dépareillées pour 1 euro et l’autre là, il les a revendu sur son stand à 5 euros. Non de nom, j’étais furieuse. Je bouffeuillais encore plus que les vieilles qui claquent du dentier. Maintenant je les tiens au bout de l’œil les brocanteurs.
Cette année, j’ai débarrassé le grenier, ça fait du bien, j’ai réussi à atteindre le fenestron tabatière.
Des années que les rayons de soleil chahutaient les toiles d’araignées et des années que je voulais mettre un coup de chiffon. C’est fait mais quel boulot de tirer les paniers, les valises en carton bouilli. Je les vends pas celles-là même si tout le monde en veut.
J’ai bagoté des heures sous les fermes empoussiérées. Quand le temps vous saute au visage, il s’y accroche et j’allais d’un bout à l’autre du grenier tenant une vieille lettre, regardant une carte postale avec des remontées de jeunesse aussi acides que de la bile.
J’ai mis dans un panier plein d’objets de rebut, des cafetières cabossées, des pipes éculées, des sabots fendillés, des poêles à marron au manche calciné, des chaussures, des ceintures que ma belle fille appelle vintage. Un plein panier à linge.
Tout vendu j’vous dis.
Emile, lui, y disait : « mais Vovonne, tu pourrais en tirer bien plus, laisse-moi faire »
Non, moi ça m’amuse de vendre 1 euro et ça m’amuse encore plus de bavarder avec les acheteurs qui n’en reviennent pas de leur bonne fortune et qui du coup s’attardent.
Y’a le hollandais du village pas loin du nôtre qui chine sur chaque brocante pour acheter de l’authentique. Qu’est-ce qu’il doit accumuler comme cochonnerie. Il a accroché une paire de sabots qu’il a verni de frais à droite de sa porte d’entrée. On voit qu’il a jamais crapahuté dans les chemins de rosée celui-là.
Je suis rentrée fourbue et contente de ma journée, mon taiseux de Félix briquait son Fergusson.
Lui aussi était content de mon « France-illustration », du coup, il a pas fait son polât et pendant que je comptais mes pièces à la table , il feuilletait son magazine.
On a fermé la porte. Ca sent la fin de l’été, faisait déjà trop frais pour laisser la soirée se glisser dans la cuisine.
Vovonne- Invité
- Message n°105
Re: Vovonne
Les mots, c’est comme la couture. Je les couds en points irréguliers et maladroits parce que j’aime bien assembler. Ca sert à rien mais ça passe le temps quand j’ai pas envie de bouger. Les mots, ils se laissent pas attraper comme ça. Comme le fil dans le chas de l’aiguille. Faut mettre de la salive sur le fil, une fois, dix fois, pour qu’il soit bien enduit et rentre dans l’aiguille. C’est agaçant et avec persévérance, on y arrive.
Quand j’enfile les mots, le temps s’arrête.
Je regarde par la fenêtre. Les hirondelles sont sur le fil, en rang serré. Elles se préparent au départ. C’est tôt cette année.
J’en reviens pas de savoir qu’elles retournent en Afrique passer l’hiver, qu’elles vont voler 300 km par jour en capturant les moucherons pour avoir un peu de graisse sous les ailes et tenir le coup. Elles pèsent même pas 20 gr et ont plus d’énergie que moi.
Cette année, dans la grange, elles ont fait leur nid sur la poutre centrale et ont copieusement cagué sur ma voiture. J’ai bien une bâche pour protéger mais comme faut la mettre chaque fois, je ne le fais pas et je vais au bourg avec une voiture moucheté de chiures blanches.
Félix, il dit que ça va faire rouiller la carrosserie. Quelle importance, hein ? Quand il pleut et c’est souvent chez nous, elle reste dehors et elle est lavée.
Tout ça, ce sont des petits riens, des mots de rien, rangés comme les hirondelles sur la ligne.
Tout à l’heure, j’irais à la maternité de la ville parce que le petit fils de Willy est né.
Il est heureux Willy, sa succession est assurée, il y croit et tant mieux.
On a encore la maternité en ville mais ça va pas durer parce qu’ils suppriment les hôpitaux locaux comme quoi y’a pas assez de monde.
Ce bébé, il s’appelle Timothée.
Moi, franchement les bébés, ça va mais de loin. Un gouzi-gouzi et hop, je le redonne à sa Maman.
Le nouveau-né qui hurle c’est pire que la sirène les premiers mercredi du mois. Ca m’arrache les oreilles et faut dire que je comprends pas pourquoi il hurle alors ça m’enlève de ma superbe et je me sens bête avec ce bout d’homme microscopique dont le visage se plisse et se convulse.
En plus ça me tape sur les nerfs.
Je lui dirais quand même qu’il est beau son bébé. Ca fait plaisir à entendre et c’est l’important.
Un bébé beau, c’est rare, faut le dire. Magique, ça oui parce que c’est la perfection un mouniou.
Je pars chercher un cadeau. Faut pas arriver les mains vides même si le cœur est joyeux.
Ce sera un cadeau pour la maman parce que souvent, j’ai remarqué, on oublie la maman.
Elle a fait son office de grotte tiède pendant neuf mois et elle se retrouve évidée comme une coquille avec son ventre tout mou où le rire ne bute plus sur la colline dure.
Elle est toute seule la maman avec son fardeau à côté dans un berceau transparent.
Personne ne se penche sur elle. Précieuse neuf mois, tout entourée de sollicitude et après pfuit tout pour le mioche.
A tout à l’heure .
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°106
Re: Vovonne
Des mots de rien, rangés comme les hirondelles sur la ligne,
Rangés comme le linge sur un fil,
Rangés comme les haricots dans le jardin,
Rangés comme une pile de bouquins,
Arrangés par Pondy... toujours un régal !
Rangés comme le linge sur un fil,
Rangés comme les haricots dans le jardin,
Rangés comme une pile de bouquins,
Arrangés par Pondy... toujours un régal !
tcvoyageur- Localisation : Lyon
- Message n°107
Re: Vovonne
C'est toujours aussi beau et passionnant !
Mais jusqu'à présent, j'arrivais à comprendre toutes les expressions, y compris celles que je ne connaissais pas avant de les découvrir dans les carnets de Vovonne.
Or, il faut bien reconnaître que je bute sur celle-ci et vais avoir besoin d'une explication de texte
Mais jusqu'à présent, j'arrivais à comprendre toutes les expressions, y compris celles que je ne connaissais pas avant de les découvrir dans les carnets de Vovonne.
Or, il faut bien reconnaître que je bute sur celle-ci et vais avoir besoin d'une explication de texte
Vovonne a écrit:elle se retrouve évidée comme une coquille avec son ventre tout mou où le rire ne bute plus sur la colline dure.
_________________
Thierry
"L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt". Et bien tant pis, je n'ai donc pas d'avenir
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°108
Re: Vovonne
Et oui ! pauvres hommes qui ne serez jamais enceints !
Allez ! un peu d'imagination !
Allez ! un peu d'imagination !
Invité- Invité
- Message n°110
Re: Vovonne
Vovonne n’explique pas les choses, elle dit et aux autres de s’adapter.
La colline dure est bien entendu le ventre maternel.
En basque il existe une expression pour dire un beau ventre bien rond, c’est sorhu ederra, sympa non ?
La femmes rit avec les yeux, la gorge et le ventre, p’têtre que les hommes aussi d’ailleurs.
A l’approche de la naissance le rire se heurte à sorhu ederra et semble rebondir.
Puis, quand l’enfant né, le rire n’a plus d’obstacle et glisse sur un ventre si mou qu’il semble se perdre. Sensation étrange.
Je ne sais pas trop si je m'explique bien !
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°111
Re: Vovonne
Dernière édition par mamina le Jeu 16 Déc - 14:39, édité 1 fois (Raison : message suprimé)
tcvoyageur- Localisation : Lyon
- Message n°112
Re: Vovonne
pondy a écrit:
Je ne sais pas trop si je m'explique bien !
C'est en tout cas plus clair pour moi. Merci Pondy
_________________
Thierry
"L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt". Et bien tant pis, je n'ai donc pas d'avenir
Vovonne- Invité
- Message n°113
Re: Vovonne
Vous y croyez vous que chaque personne à quelque chose de bon à l’intérieur ?
Félix, il dit que j’ai des lunettes roses mais moi je dis que dans le cœur des gens, bien caché il y a une petite dorure, du brillant pour lequel il faudrait juste un coup de mirror avec un chiffon doux.
Moi, je suis quelqu’un de très lâche, j’aime pas les disputes, j’aime pas les débats politiques, j’aime pas les gens qui disent du mal dans le dos des autres. Tout ça, ça me mets mal à l’aise et du coup, je me tais et ma pensée va à toute vitesse. Souvent c’est la nuit que je trouve la bonne réponse, celle que j’aurais dû faire au bon moment.
Ce qui me déstabilise, c’est l’aplomb des gens qui sont tellement sûrs d’eux que je me sens toute bête même si je sais que la personne est dans l’erreur.
Mais j’ai ma technique, j’écoute et comme ça je suis toujours tranquille.
Les gens, ce qu’ils aiment le plus, c’est parler d’eux et même mieux, c’est parler des gens dont ils s’imaginent qu’ils sont plus haut qu’eux et comme ça, ça les hausse du col.
Dans notre village mouillé de pluie aujourd’hui les langues vont bon train.
Les voisins, ceux qui sont devenus nos amis ont fait poser une porte d’entrée. Y’en avait déjà une, ils l’aimaient pas, c’était l’ancien propriétaire qui l’avait mis. Une porte de Lapeyre avec des carreaux et des spirales en fer forgé. Ca faisait tout neuf, moi j’aimais bien.
Eux, y z’ont mis une porte à deux battants et heurtoir, comme autrefois quand la maison a été construite.
Ca a pas traîné, ça jase. TGV, d’un coup de pédale s’est arrêté à la maison :
« t’as vu Vovonne, z’ont mis une nouvelle porte, ça doit leur bouffer de la lumière. Avec l’autre c’était vitré au moins, que là, y’a que l’imposte. Ca a dû leur coûté un bras ».
Il avait son ton jaloux.
Tsss, pareil après avec Jean-Jean.
Je n’ai jamais parlé de Jean-Jean, non pas parce qu’il n’a rien d’intéressant, juste qu’il ne sort que lorsqu’il pleut, alors forcément, moi, quand il pleut je suis pas dehors. Jean-Jean, l’est tout maigre. Un grand chôlat qui porte été comme hiver des bottes en caoutchouc. Il chasse les escargots. Pas les p’tits gris, juste les gros bourgogne bien gras. Dès qu’il y a une bonne beurrée, on voit Jean-Jean, sa casquette, ses bottes et son bâton. Il porte l’index à la casquette pour saluer, comme un soldat.
Aujourd’hui, je coupais mes soleils qui sont morts, ça pleuvotait les dernières gouttes et Jean-Jean a juste ralenti devant chez moi.
« y’en a qui s’y croît » qui m’a dit d’un coup de menton vers la porte des voisins.
C’est comme ça, des petites Ch'titetés. Pas qu’ici au village, partout.
Quand j’écoute la politique à la télévision, c’est un parti contre un autre parti à petits coups de salive aigre.
Heureusement qu’on n’a pas les odeurs parce que ça doit sentir les dents cariées toutes ses bouches qui se jettent des horreurs.
J’ai perdu le fil du début, c’est quand je disais que dans chaque gens y’a du gentil. Même chez le plus teigneux. Le plus teigneux, souvent, j’ai bien remarqué, c’est celui qui a de la peur au ventre.
N’importe quelle peur. La peur s’est moche quand on est adulte. Faut cacher ses faiblesses et c’est mieux d’être teigneux.
Le teigneux ici, chez nous c’est Jacques.
Je raconterais plus tard, c’est l’heure de ma piqûre et c’est ma voisine qui me la fait. Faut les faire à la même heure.
C’est vrai, j’ai pas pensé à parler de mes piqûres. Tout à l’heure aussi, j’ai plus le temps.
Vovonne- Invité
- Message n°114
Re: Vovonne
Alors je reviens.
Les piqûres, c’est à cause du plafond des voisins.
Félix et moi, on est allé leur donner la main.
Ils cassent les plafonds pour faire apparaître les poutres.
Les plafonds dans l’ancien temps, c’était de la bonne construction. J’explique parce que c’est important de savoir comment c’était fait.
Y mettaient les poutres tout du long puis en travers, y clouaient des baguettes de châtaigniers, bien serrées. Avant de les clouer, ils enfilaient des brassées de branches de houx pour éloigner les rats et les fouines. Et enfin, ils plâtraient le plus lisse possible et ils peignaient le plâtre.
Casser les plafonds, c’est une sainte horreur. Cent quatre vingt ans de poussières, de plâtre, de houx sur la figure. Les hommes cassaient à la barre à mine et nous les femmes, on ramassait les baguettes de châtaigniers et les branches de houx.
J’peux dire que du houx centenaire ça pique autant que du tout frais.
En même temps que tout nous dégringolait dessus y’avait des rats desséchés et aussi, un chat momifié, coinçé entre les poutres. L’a dû miauler longtemps avant de mourir.
La voisine, elle l’a pris en photo avec sa gueule ouverte comme si il criait et ses pattes toutes sèches.
C’est Alain le chef de gare qui le veut. Une momie pareille, ça lui plait, ça va avec sa collection de crânes et de dents. Y’avait aussi des coquilles d’œufs que les fouines cachaient là.
Et mes piqûres dans tout ça ?
Une baguette de châtaignier était encore enfouie sous les gravats, j’ai marché dessus. J’étais avec mes sabots en plastique rose et le clou, il est rentré sous les orteils. Ca fait mal, et même très mal. Le soir j’avais le pied dodu tout rouge et je pouvais plus marcher.
Félix m’a conduite à l’hôpital et y m’ont fait deux piqûres pour le tétanos. Une pour le vaccin et l’autre pour au cas ou le tétanos se soit collé sur le clou et se promène déjà dans moi.
Et pis aussi des antibiotiques que j’ai eu la langue toute noire à cause d’eux et pis après c’est le mollet qu’est devenu chaud et rouge alors on est retourné à l’hôpital, y ont passé un tube avec un œil qui voit dans la jambe et y z’ont dit que j’avais presqu’une phlébite et allez ma p’tite dame, c’est rien, 45 jours de toutes petites piqûres que vous pouvez faire toute seule et vous s’rez guérie.
Sont pas bien ! Un clou dans le pied et je me mettrais maintenant des aiguilles dans les cuisses.
La voisine qui était très embêtée parce qu’elle dit que c’est à cause d’eux, ben c’est elle qui fait les piqûres. Ca lui fait faire son métier qu’elle fait plus depuis qu’elle est là.
Voilà l’histoire. Je sais que c’est pas intéressant les p’tits malheurs des autres mais moi je raconte quand même, ça permet de pas oublier les choses de l’été.
J’ai encore à parler de Jean-Jean, ce sera demain.
Je vais voir mon lapin préféré, il pèse 6k800 maintenant, l’est un peu à l’étroit dans son clapier.
Quand je lui caresse le chanfrein, il grince des dents de plaisir.
D’habitude, les lapins quand ils grincent des dents ça veut dire qu’ils souffrent.
Comme quoi, je dis toujours, faut jamais généraliser.
Les piqûres, c’est à cause du plafond des voisins.
Félix et moi, on est allé leur donner la main.
Ils cassent les plafonds pour faire apparaître les poutres.
Les plafonds dans l’ancien temps, c’était de la bonne construction. J’explique parce que c’est important de savoir comment c’était fait.
Y mettaient les poutres tout du long puis en travers, y clouaient des baguettes de châtaigniers, bien serrées. Avant de les clouer, ils enfilaient des brassées de branches de houx pour éloigner les rats et les fouines. Et enfin, ils plâtraient le plus lisse possible et ils peignaient le plâtre.
Casser les plafonds, c’est une sainte horreur. Cent quatre vingt ans de poussières, de plâtre, de houx sur la figure. Les hommes cassaient à la barre à mine et nous les femmes, on ramassait les baguettes de châtaigniers et les branches de houx.
J’peux dire que du houx centenaire ça pique autant que du tout frais.
En même temps que tout nous dégringolait dessus y’avait des rats desséchés et aussi, un chat momifié, coinçé entre les poutres. L’a dû miauler longtemps avant de mourir.
La voisine, elle l’a pris en photo avec sa gueule ouverte comme si il criait et ses pattes toutes sèches.
C’est Alain le chef de gare qui le veut. Une momie pareille, ça lui plait, ça va avec sa collection de crânes et de dents. Y’avait aussi des coquilles d’œufs que les fouines cachaient là.
Et mes piqûres dans tout ça ?
Une baguette de châtaignier était encore enfouie sous les gravats, j’ai marché dessus. J’étais avec mes sabots en plastique rose et le clou, il est rentré sous les orteils. Ca fait mal, et même très mal. Le soir j’avais le pied dodu tout rouge et je pouvais plus marcher.
Félix m’a conduite à l’hôpital et y m’ont fait deux piqûres pour le tétanos. Une pour le vaccin et l’autre pour au cas ou le tétanos se soit collé sur le clou et se promène déjà dans moi.
Et pis aussi des antibiotiques que j’ai eu la langue toute noire à cause d’eux et pis après c’est le mollet qu’est devenu chaud et rouge alors on est retourné à l’hôpital, y ont passé un tube avec un œil qui voit dans la jambe et y z’ont dit que j’avais presqu’une phlébite et allez ma p’tite dame, c’est rien, 45 jours de toutes petites piqûres que vous pouvez faire toute seule et vous s’rez guérie.
Sont pas bien ! Un clou dans le pied et je me mettrais maintenant des aiguilles dans les cuisses.
La voisine qui était très embêtée parce qu’elle dit que c’est à cause d’eux, ben c’est elle qui fait les piqûres. Ca lui fait faire son métier qu’elle fait plus depuis qu’elle est là.
Voilà l’histoire. Je sais que c’est pas intéressant les p’tits malheurs des autres mais moi je raconte quand même, ça permet de pas oublier les choses de l’été.
J’ai encore à parler de Jean-Jean, ce sera demain.
Je vais voir mon lapin préféré, il pèse 6k800 maintenant, l’est un peu à l’étroit dans son clapier.
Quand je lui caresse le chanfrein, il grince des dents de plaisir.
D’habitude, les lapins quand ils grincent des dents ça veut dire qu’ils souffrent.
Comme quoi, je dis toujours, faut jamais généraliser.
Invité- Invité
- Message n°115
Re: Vovonne
Il devait avoir bien du doré de bonté au fond de lui, le gars qui avait mis son chat dans le torchis de la cloison.
Il a du rire, ce faisant.
Peut-être même qu'il a fait ça devant un public.
Ou qu'il l'a raconté, après coup, un dimanche de communion.
Il a du rire, ce faisant.
Peut-être même qu'il a fait ça devant un public.
Ou qu'il l'a raconté, après coup, un dimanche de communion.
Vovonne- Invité
- Message n°116
Re: Vovonne
Aujourd’hui, je viens ici pour lire et voilà que j’écris.
Il y a un Monsieur qui écrit une histoire de mariage, pour le moment on voit pas, ni Monsieur le Maire, ni Monsieur le Curé et je trouve qu’il n’y va pas avec le dos de la cuillère. C’est vrai quoi, il parle des gens qui vont se marier et des cousins et ces gens, sont tous remplis de défauts les plus laids qu’ils soient.
Ce Monsieur qui écrit, c’est vraiment bien écrit et c’est si méchant que je peux pas croire que Marie-Louise soit aussi bête et Pierre si cynique.
Il se sert des penchants politiques de tous, de leur façon de vivre. Le couple des futurs mariés d’extrême droite est aussi laid que les cousins avec leur bonne et leur chauffeur. Même le Général de Gaulle semble sali.
Il y a l’odeur de la guerre et il y a l’odeur de tous ces gens satisfaits d’eux-mêmes.
Et moi, je me sens toute triste de lire ça, parce qu’il n’y a pas l’odeur du bonheur pour personne même quand la cousine fait des galipettes et mange bien au restaurant.
Ce qui est terrible dans l’histoire de ce Monsieur c’est que les futurs mariés deviennent sympathiques.
Ici aussi dans mon village, y’a toutes sortes de gens et Dieu m’est témoin que je ne suis pas d’accord avec tous pour la politique. Y’a notre chef de gare, et bien, il est à gauche de la gauche, ça veut dire qu’il est pour la collectivité et le partage des biens, c’est ça, non ?
L’autre matin, j’entends brailler, je suis curieuse presque commère, même commère tout court d’ailleurs.
Je vais dans ma cour pour mieux écouter et j’entends notre chef de gare qui crie au chauffeur d’un camion de dégager de devant l’entrée de son pré, là où il a tendu un fil de fer avec un panneau –stationnement interdit- qu’il a peint sur un couvercle de pot de peinture.
Son pré, y’a pas de vaches, y’a que des chevreuils qui viennent faire peur à sa femme de temps en temps. Mais c’est Son Pré.
Alors, moi je dis que si on est à gauche de la gauche comme ils disent à la télévision (d’ailleurs j’ai remarqué, on dit extrême droite et gauche de la gauche), c’est déplacé de faire état de ses propriétés à un ouvrier qui trime dans son camion. Non mais des fois…
Et pourtant, l’est gentil notre chef de gare.
Comme quoi, ce qui compte, c’est de mettre ses actes en face de ses paroles. C’est ça qui est important.
Vovonne- Invité
- Message n°117
Re: Vovonne
Cette histoire de parti politique, ça me trotte dans la tête et je repense aux extrêmes. Tout à l’heure, j’ai écrit l’exemple de la gauche de la gauche alors faut aussi que je raconte la droite de la droite.
Ici, nous, on a un Jean-Marie, c’est pas une plaisanterie, c’est son prénom pour de vrai. Lui, il aime pas les étrangers en couleur ou pas en couleur et l’étranger c’est aussi les parisiens. Dès qu’ils ont le dos tourné ou plutôt le volant dirigé vers Paris, il va ramasser les noix et les pommes. Cette année, il est bien marri parce que sa récolte de pommes était maigrichonne. Peut-être que les parisiens avaient ramassé avant de partir ce qui n’est pas normal du tout. Tout ce qui pousse sur son territoire lui appartient en propre. Et c’est connu l’étranger, ça vient manger les pommes des autres.
Ces idées de propriété sont très bizarres. On dit que les extrêmes s’attirent, ç’est sûrement vrai parce que Jean-Marie et le chef de gare se rapprochent tellement qu’à notre dernière fête, ils se sont tapés dessus.
Enfin, moi je m’en fiche, je vote pas pour une bouille joufflue avec deux yeux bleus et ni pour une figure ridée avec un seul œil bleu.
Cette fois, j’ai fini, je reviens demain.
Vovonne- Invité
- Message n°118
Re: Vovonne
J’ai pas beaucoup dormi. C’est à cause de la lecture.
La voisine m’a prêté deux livres. Il y avait longtemps que je n’avais pas lu bien au chaud sous les couvertures.
Il a fait très beau hier mais les soirées sont décidément aussi frileuses que moi.
Félix regardait la télévision et j’avais pas envie.
Les deux livres étaient posés sur la table.
Y’en a un qui m’attirait plus que l’autre parce que l’image sur la couverture faisait bizarre. Une voiture américaine rouge dans un champ jaune avec des montagnes pointues et enneigées au fond et un saint avec son auréole. La voisine, elle m’a dit qu’elle aimait beaucoup cet écrivain, qu’il était américain. Moi je trouve que son nom, ça fait breton.
Le livre, il s’appelle « les clochards célestes » et l’écrivain Jack Ké… zut, j’ai oublié, faut que j’aille regarder sur la table de nuit tout à l’heure.
J’ai lu très tard mais pas très vite, c’est pas que ce soit difficile mais c’est nouveau pour moi.
Bouddha et Jésus, je crois que le héros de l’histoire réfléchit beaucoup. Finalement le nirvana dont il parle c’est le même ciel que pour tous les gens qui croient.
Après j’ai éteint la lampe. Félix ronflait depuis longtemps.
J’ai regardé les étoiles qui semblaient plus grosses et plus brillantes que d’habitude et puis j’ai dormi.
L’autre livre, ça parle des vieilles gens, alors j’ai le temps de le lire. C’est d’une femme écrivain célèbre qui est maintenant vieille elle aussi. La voisine m’a dit que c’était génial mais je me dis que ce doit être mélancolique et je préfère le lire en deuxième. Ca s’appelle « la touche étoile » et l’écrivaine c’est Benoite Groult. La voisine m’a expliqué que c’était une féministe et qu’elle avait écrit aussi avec sa sœur. La couverture est toute bleue avec le ciel et la mer mélangée et le soleil du soir qui éclaire l’eau.
Quand je regarde un film, ça dure deux heures à peu près et puis on éteint la télévision et c’est fini.
Mais quand je lis mes livres, même si c’est la même durée qu’un film après c’est pas fini parce que dans ma tête, ça tricote longtemps et ma pensée, elle va dans tous les sens et il faut que je la remette sur un seul chemin. C’est fatiguant je trouve.
C’est fatigant et aussi c’est comme si ça me faisait trembler en dedans comme quand on est amoureux. Ca me fait ça quand je marche dans les chemins et que je pense à ma vie avec Félix.
Je vais au jardin maintenant. Il n’y reste plus grand-chose, les pommes de terre sont toutes arrachées et attendent l’hiver au noir de la grange. Il reste quelques poireaux et quelques potirons et ma foi, c’est tout.
Vovonne- Invité
- Message n°119
Re: Vovonne
Les frênes sont hébétés aujourd’hui. La pluie a été féroce, leurs pieds humides sont proches de la bronchite et leurs bras s’ébrouent comme des vieux teckels. Je suis comme eux ce matin et en plus j’ai mal aux dents.
Je n’ai pas envie de voir la chignole du dentiste si c’est pour m’en faire sauter une.
Je cours droit au râtelier et un râtelier dans un verre plein de mousse sale sur la table de nuit ne m’attire pas du tout.
Je ne me vois pas dire à Félix : « fiens de couffer, f’est pas raisonnable de feiller si tard »
Quand j’ai mal aux dents, j’ai le sourire qui coince et je suis d’une humeur de dogue.
Je crois toujours que la douleur ne veut rien dire, que la dent ne s’abîme pas, que ça va passer tout seul. Ca ne passe pas tout seul, voilà.
J’ai frotté un clou de girofle sur l’endroit qui fait mal, rien n’y fait et maintenant j’ai un goût de choucroute dans la bouche.
Si j’avais de l’argent je ferais faire les nouvelles techniques comme celles d’implants, j’ai vu dans le magazine –pleine vie-. C’est que ça coûte la peau des fesses.
Aïe-aïe, je veux pas non plus une dent en argent qui brille comme un satan, ni en or.
Je ferais mieux de prendre un rendez-vous vite fait.
Leila arrive demain. Toute seule, c’est pour son travail. Mon fils ne l’accompagne pas.
Elle travaille dans un cabinet d’architecte intérieur, mais je l’ai déjà dit, et quand le patron il a parlé du château, elle a dit : « mais je connais, c’est à cinq minutes de chez ma belle-mère », elle a eu le travail.
Ce château, ce sont des japonais qui l’ont acheté il y a deux ans. Je me demande comme des gens qui habitent à Tokyo ont eu envie d’un château dans notre campagne perdue.
Y’a même pas de cerisiers dans le parc, que des chênes et des charmes.
Leila va habiter avec nous chaque fois qu’il y aura des réunions de chantier et je suis bien contente. Elle chipote pas comme notre autre belle-fille et elle dit jamais que notre baignoire sabot est incommode et démodée. C’est vrai en plus. Je manque de me casser la binette une fois sur deux.
Il faudra que je m’habitue de voir son petit téléphone portable sur la table quand on mange, ce minuscule boîtier qui fait ordinateur et appareil photo prend beaucoup de place dans sa vie, il ne la quitte jamais même quand elle va aux toilettes. Je me demande si quand elle fait pipi et que ça sonne, elle répond. L’autre, à l’autre bout il doit entendre non ? Quand je lui dis que ce ne serait pas grave si elle ne répondait pas elle m’affirme qu’elle doit rester joignable, que c’est essentiel. Bon, elle le croit très fort et je vais pas la contredire parce que chacun met l’essentiel où il veut.
Félix a appelé le dentiste pour moi, ça m’énerve et en même temps je suis soulagée.
Il a si bien noirci le tableau que j’ai rendez-vous –entre deux-. Je crois bien que ça veut dire que je vais poireauter deux heures. Il y a des revues de 2006, des –femme actuelle- qui sont plus si actuelles que ça et des –National Géographic- avec des photos si belles d’autres pays que j’attends sans trépigner.
Alors je vais mettre mes chaussures et zou, je file la mâchoire serrée.
Chulie- Invité
- Message n°120
che proteste!
D'abord et déjà: l'azerty, il écrit le correct qu'une fois sur teux, c'est pas d'abord, c'est t'aboooord, et c'est pas déjà, c'est encooore - ou alors déchà, pour les puristes.
Ensuite: Vovonne ça va vraiment bas, tes tents, hein. Egoute-toi une fois:
Quant à tes nibbons, je les plains. Ah oui, je les plains dans leur parc vide. Les pôvres. Là où y'a pas de chêne y'a pas de plaisir!
Ecoute, si vois Madame la Maire, dis-lui donc que le loguine, il a a pas accepté mon nom (Chermaine). Du goup, ch'ai du me rabetisser. Tant pis hein. C'est comme ça. Personne n'y peut rien...
Allez hopla, ça m'a fait plaisir. Faites-le bien et gardez Dieu devant les yeux.
Ensuite: Vovonne ça va vraiment bas, tes tents, hein. Egoute-toi une fois:
La jougroute - S'Surkrutt, pour les buristes - c'est le goût des baies de chenièvre, pas les clous de chirofle, c'est bas parce qu'on est des zalsaciens qu'il faut nous prendre pour des gonds, hein.J’ai frotté un clou de girofle sur l’endroit qui fait mal, rien n’y fait et maintenant j’ai un goût de choucroute dans la bouche.
Quant à tes nibbons, je les plains. Ah oui, je les plains dans leur parc vide. Les pôvres. Là où y'a pas de chêne y'a pas de plaisir!
Ecoute, si vois Madame la Maire, dis-lui donc que le loguine, il a a pas accepté mon nom (Chermaine). Du goup, ch'ai du me rabetisser. Tant pis hein. C'est comme ça. Personne n'y peut rien...
Allez hopla, ça m'a fait plaisir. Faites-le bien et gardez Dieu devant les yeux.
Vovonne- Invité
- Message n°121
Re: Vovonne
Et voilà, c’est fait, j’ai une dent en moins.
J’ai passé une heure devant le miroir à sourire semblant pour voir mon allure.
C’était pas facile avec une joue endormie que je soulevais avec mon doigt comme si j’avais une peau morte.
Une prémolaire qu’il m’a arraché, sans brutalité faut le dire, l’avait même mis un coton à la fraise avant de piquer avec sa cochonnerie d’’aiguille d’anesthésie.
Edentée je suis, je me sens comme une fourchette à qui il manquerait une de ces quatre dents.
Je regarde le miroir et je souris chichement, là ça va, on voit rien, j’agrandis le sourire et paf, un trou, un gouffre noir. Quand j’aspire mes joues, ça fait un goût bizarre.
Je vais m’habituer, parce que on s’habitue à tout mais c’est ennuyeux parce que ça sent mauvais la vieillesse tout ça.
Pardon d’ennuyer les gens qui lisent avec mon histoire de chicoteur, faut savoir quand même que les dents, c’est comme les seins, ça tombe sans crier gare. La peau des bras aussi floppe, tout dégringole pour être plus près de la terre histoire de s’habituer à la condition éternelle.
Pendant que j’écris, la porte de la cuisine est ouverte. Félix a enlevé le rideau à lanières, les mouches ont disparu, presqu’en même temps que les hirondelles, preuve que ces oiseaux s’en nourrissent et un hérisson mange dans l’assiette du chat sur le seuil. Le matou est absent,il cherche les lérots.
Autrefois on les mangeait les hérissons. Fallait donner un coup de canif entre les griffes, passer une paille dans l’orifice et souffler pour décoller la peau des piquants. Après on enfilait un bâton et on grillait sur le feu. Oh, j’ai bien dû raconter ça, je radote.
D’ici que je devienne tout encanachée y’a pas loin.
Faudrait que je nettoie la maison mais je suis remplie de langueur. D’ailleurs, elle n’est pas sale. Il y a deux jeunes araignées, entre les poutres, qui ont encore besoin d’apprendre à faire de la balançoire, vais pas détruire leur boulot et quelques moutons qui ont perdu leur pâture et se cachent soigneusement sous le meuble de la télévision et c’est tout.
Hier, y’a le bulldozer chez les voisins qui a crevé leur fosse septique, je dis pas merci au conducteur de l’engin parce que ma tarte au chocolat dans le four donnait tout le parfum qu’elle pouvait, tout ça pour rien, tout le village puait la merde.
La voisine rigolait, moi, à sa place j’aurai été furieuse. Et elle, elle disait que de toute façon, ils allaient changer de système d’évacuation. En attendant que les ouvriers colmatent, ça a senti deux heures et encore plus que le remorque de fumier de Joseph. Joseph, il s’en fiche aussi des odeurs, il remplit sa remorque, il roule à pleine puissance de son tracteur et sème des grosses flaques de purin sur la route.
Y’a un cycliste qui descendait le chemin et qui râlait en pédalant et disait « bande de dégueulasses ». Alors, par esprit de clocher, le fumier de Joseph m’est devenu sympathique.
Les cyclistes, moi ça m’énerve, en plus, maintenant ils mettent une cloche en plastique sur leur crâne et ils ont l’air idiot, sans compter leur culotte de vélo qui moule leurs bijoux de famille et leurs chaussures à bascule. Moches, ils sont moches. En plus d’être moches, ils sont coincés du sourire. Peut-être qu’ils ont des dents en moins.
Je quitte mon ordinateur, on va chez Atac faire le ravitaillement.
Mon ordinateur, c’est comme le bréviaire de Monsieur le Curé, c’est difficile de l’abandonner sur le coin de la table.
tcvoyageur- Localisation : Lyon
- Message n°122
Re: Vovonne
Je sais que je me répète, mais je me régale à chaque fois.
Merci Vovonne !
Merci Vovonne !
Si c'est pas magnifique, ça !Vovonne a écrit:même que les dents, c’est comme les seins, ça tombe sans crier gare. La peau des bras aussi floppe, tout dégringole pour être plus près de la terre histoire de s’habituer à la condition éternelle.
Celle-là, non seulement je veux la retenir pour éventuellement la ressortir (Vovonne, je te devrais des droits d'auteur), mais en plus, elle me déculpabilise de tous ces moments (si nombreux) durant lesquels je ressens la même "langueur".Vovonne a écrit:Faudrait que je nettoie la maison mais je suis remplie de langueur. D’ailleurs, elle n’est pas sale. Il y a deux jeunes araignées, entre les poutres, qui ont encore besoin d’apprendre à faire de la balançoire, vais pas détruire leur boulot et quelques moutons qui ont perdu leur pâture et se cachent soigneusement sous le meuble de la télévision et c’est tout.
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Thierry
"L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt". Et bien tant pis, je n'ai donc pas d'avenir
Vovonne- Invité
- Message n°123
Re: Vovonne
Avant j’écrivais dans mes carnets et maintenant sur l’ordinateur.
Avant personne ne voyait mes carnets et maintenant c’est comme si je laissais mon ordinateur sur le comptoir du bistrot du village virtuel. C’est bien comme ça que ça s’appelle ?
Y’en a qui ne regardent pas et y’en a qui lisent et y’en a qui laissent un message.
Ca me rappelle un livre que j’avais acheté à Atac quand ils font la foire aux livres dans les bacs. Ce livre s’appelait « une promesse » de Sorj Chalandon. Y’en avait tout une pile parce que les gens de chez nous, ils lisent pas des prix de littérature, alors chez Atac ils avaient bradé toute la pile.
J’en ai acheté qu’un.
C’était l’histoire de quelques amis qui allaient chaque jour dans une maison où était mort un couple. Ils avaient fait une promesse de fraternité pour que leurs âmes ne disparaissent pas dans l’oubli. Ainsi chaque jour, au bistrot, ils notaient dans un cahier : « je suis passé et j’ai allumé les lampes » « j’ai changé l’eau des fleurs » « j’ai mis des draps propres ».
C’est un livre délicat où tous les gens chuchotent.
Un peu comme ici, il n’y a pas de tapage et j’aime bien raconter ma vie tranquillement.
Je me suis trompée avec le clou de girofle qui n’est pas pareil qu’une baie de genièvre, il n’empêche que c’est quand même un goût de chou que j’avais dans la bouche.
Ce n’est pas très poétique quand j’écris et j’ai du mal a enfilé des mots pour les faire valser.
Y’en a qui font de la poésie avec des brins d’herbe, tant mieux pour eux. Le brin d’herbe, c’est juste pour le mettre entre les lèvres pour siffler. Je sais bien faire ça et c’est tout.
Y’en a qui écrivent des choses très belles sur le mois de septembre et après, ils effacent comme si le mois était fini. C’est comme si je posais sur la table des œufs à la neige bien fermes dans une crème anglaise onctueuse à souhait et que d’un coup je décide que non, il n’y aura pas de dessert aujourd’hui.
Le mois de septembre, c’est le mois où mon fils ainé est sorti de mon ventre. Le mois qui me dit que l’été s’étire et hoquette encore un peu, où le soir s’infiltre plus vite dans la cuisine. Un mois douillet avant de frissonner pour de bon.
C’est le mois aussi de la réunion annuelle de mon association. Enfin c’est pas la mienne, j’en fais partie. La protection de notre forêt, c’est mon dada. Les vieux arbres sont tellement importants.
La moitié des oiseaux forestiers nichent dans leurs cavités, les pics, les chouettes et aussi des mammifères comme les chauves-souris, les martres ou les écureuils. Alors on se bat contre l’enrésinement et on gagne pas mais on y croit.
Faut que je parte. Pas loin, chez la voisine, c’est l’heure de ma piqûre.
La voisine, elle a du courage en ce moment. Avec son mari, ils vivent dans la cuisine. Ils ont mis même des matelas pour dormir. Ca va être dur l’hiver. Y’a une pelleteuse à l’intérieur du futur salon et des futurs bureaux. J’aurais jamais pensé qu’on pouvait faire rentrer une pelleteuse dans une maison.
Ca me fait bizarre qu’ils veulent deux bureaux. Et même un bureau d’ailleurs. A quoi ça peut bien servir quand on a une table, ça suffit pour faire les papiers. Sont pas comme nous ces gens, il leur faut tellement de place.
Chacun voit midi à sa porte, c’est ce qu’on dit et moi, ce que je dis c’est que depuis qu’ils sont là, à midi, j’ai plus d’appétit qu’avant, alors c’est bien.
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°124
Re: Vovonne
Coucou Vovonne !
Ne crois pas ça... tout le monde le lit ton carnet et des fois même qu'on est trop ému pour pouvoir dire quelque chose après...
Surtout ne nous prive pas de dessert, nous avons été très sages !
Tu voudras bien leur demander à tes voisins pourquoi il leur faut tant de bureaux à la campagne ?
Peut-être qu'elle, elle est écrivaine et que lui veut avoir la tranquillité loin du frappage du clavier ?
Ils sont bien courageux d'entreprendre une rénovation de maison ; en plus ils ont l'air de vouloir faire dans le détail, tout à l'ancienne... ça va finir par être la plus belle maison du village !!!
Bisous à toutes les deux !
Ne crois pas ça... tout le monde le lit ton carnet et des fois même qu'on est trop ému pour pouvoir dire quelque chose après...
Surtout ne nous prive pas de dessert, nous avons été très sages !
Tu voudras bien leur demander à tes voisins pourquoi il leur faut tant de bureaux à la campagne ?
Peut-être qu'elle, elle est écrivaine et que lui veut avoir la tranquillité loin du frappage du clavier ?
Ils sont bien courageux d'entreprendre une rénovation de maison ; en plus ils ont l'air de vouloir faire dans le détail, tout à l'ancienne... ça va finir par être la plus belle maison du village !!!
Bisous à toutes les deux !
gallia- Localisation : Campagne québécoise, Outaouais
- Message n°125
Re: Vovonne
et bien que de jolis moments décrits, l'art et la manière de décrire des moments ordinaires et de les transformer en moments de bonheur.
c'est joliment écrit, ça me donne du baume au coeur, et ça me décrit des temps que j'aurai aimé connaître mais que je n'ai qu'effleuré...
c'est joliment écrit, ça me donne du baume au coeur, et ça me décrit des temps que j'aurai aimé connaître mais que je n'ai qu'effleuré...