Comme je n'ai pas la télévision, je n'avais jamais vu ni entendu parler de ITO Shiosi. Son livre "La boite noire", paru chez "Picquier", une superbe maison d'édition qui nous fait découvrir tout l'éventail de la littérature asiatique, était mis en évidence sur un présentoir d'une bibliothèque de Paris.
Sauf que ce n'est pas un roman.
ITO Shiori est une journaliste. Elle raconte comment et en quelles circonstances elle a été violée par un célèbre journaliste, je n'écris pas par son confrère, car ce type il est plutôt du genre patron de presse, sûr de son pouvoir sur la piétaille journalistique. Malheureusement pour elle, c'est aussi un type qui a écrit une biographie flagorneuse du premier ministre Shinzo Abe - son épouse "like" les interventions du thuriféraire de son mari sur les réseaux sociaux. Des relations qui comptent dans cette société japonaise ultra conservatrice cadenassée par des impératifs moraux-traditionnels.
ITO Shoiri ne veut pas se taire, elle parle, elle accuse, produit des preuves, alors que même sa famille lui conseille de laisser passer, de ne pas "se suicider socialement". Avec un courage inouï, elle va réussir à rester debout, malgré cette chape de plomb du pouvoir politique, il faut bien l'écrire, qui veut à tout prix - un prix incroyable - lui clouer le bec. Conséquence : elle n'est plus employée par les médias japonais.
A ma grande surprise, j'ai constaté qu'il y a beaucoup de liens internet sur cette affaire.
En lisant son livre, on apprend que c'est en Suède qu'il y a le plus de viols !!! Tiens donc ! A vrai dire je suis à moitié surpris.
Bien que cela n'ait rien voir avec ITO Shiori, mais on peut penser au cadre judiciaire japonais, Carlos Goshn devrait se faire du soucis en ce qui concerne l'indépendance de la justice japonaise.
Au quotidien, la vie au Japon est sécurisée, on ne risque rien, c'est poli, ordonné, seulement, comme de partout, sans tomber dans la paranoïa, il faut tout de même ne pas s'aventurer dans des endroits, surtout isolés, tout seul, et en l’occurrence... toute seule, telle Tiphaine Veron qui a été bien imprudente, il y a un an. Partir seule dans la nature, même au Japon... Est-elle tombée dans un ravin, une chute mortelle, ou alors hélas le plus probable, une mauvaise rencontre, un viol, un meurtre ; et dans ce cas là, il est improbable qu'on la retrouve un jour, ou alors par un énorme hasard.
ITO Shiori raconte qu'elle ne s'est jamais sentie en danger au cours d'un reportage sur les guérilleros colombiens, alors qu'à la suite de son viol elle a vécu dans une angoisse permanente, elle s'est rendue compte avec effroi qu'elle avait le sentiment d'être plus en insécurité dans ce Japon si bien policé qu'au milieu de ces hommes en armes dans une montagne en Colombie.
Si vous voulez vous faire une idée sur la société japonaise, rien de mieux que sa littérature.
Il ne fait pas partie des grands auteurs, comme Kafu, Dazai, Takami,et bien d'autres encore, mais je conseille vivement de lire "La tête du directeur général", de YAMADA Tomohiko et vous découvrirez comment et pourquoi c'est une gérontocratie qui détient le véritable pouvoir.
Maadadayo !