Mais avant que Noël ne soit dévoyée par une célèbre firme de boissons gazeuses qui a bien réussi son coup marketing en nous imposant son bonhomme rouge et blanc jovial et soi-disant généreux, il existait partout déjà d'autres Noëls...
De la bouche de ma grand-mère j'ai ainsi pu découvrir les Noëls savoyards d'avant et de son temps...
Dès le Moyen-Âge (et peut-être même avant encore), en Savoie et dans les comtés alentours, les enfants ne connaissaient pas de Père Noël, mais rêvassaient en écoutant les histoires du Père Challande, bonhomme à la longue barbe et coiffé d'un chapeau pointu.
Le Père Challande arrivait plus tôt en décembre et passait lui aussi par la cheminée pour déposer quelques petits cadeaux dans les souliers, une friandise, déjà un délice et plaisir extraordinaire. Les enfants chantaient alors une petite comptine :
"Challande est venu, son bonnet pointu, sa barbe de paille, cassons les annailles*, mangeons du pain blanc, jusqu'au Nouvel An."
* annailles = noix
L'approche de Noël était effectivement la période du pain blanc, appelé "pain de Challande" qui cuisait dans le four banal, alors que le reste de l'année, les pains "gris", de son et de seigle, étaient le quotidien.
Mais Noël était surtout et avant tout une fête chrétienne qui réunissaient les familles en veillées en attendant la messe de minuit, qui se déroulait vraiment à minuit. S'ensuivait ensuite le réveillon, repas de rissoles auprès du feu maintenu dans la cheminée grâce aux bûches apportées par les invités (à l'origine, la bûche se consumait plutôt qu'elle se consommait !). Il n'était point question non plus de sapin, de guirlande, de boules... La maison était propre, les convives endimanchés et les bougies disséminées, et cela suffisait.
Commençaient alors le cycle des 12 jours au cours desquels les agapes se succédaient pour fêter la nouvelle année : pendant longtemps, en Savoie, l'année commençait le 25 décembre (challande vient du latin calendas = premiers jours de l'année). Ainsi, les veillées et les étrennes (petits cadeaux échangés) se prolongeaient jusqu'à l'Epiphanie, le 6 janvier...
Au XX° siècle, les Noëls savoyards de ma mère avaient déjà évolués, le fantastique Père soda étant passé par là...
Mais Maman me racontait encore ses Noëls aux longues veillées et messes de minuit à minuit, aux petits cadeaux dans les souliers le 25 au matin, mais encore apportés par le Petit Jésus (et non pas encore par le bonhomme rouge et blanc), une orange, une barre de chocolat, de belles friandises déjà. Et, un peu plus tard seulement, quand ils ont été un peu plus grands : une poupée, un jeu de construction de bois, quelques bandes dessinées, cadeaux communs à l'ensemble de la nombreuse fratrie...
Et vous, par chez vous, et "de votre temps" ou de celui de vos anciens, c'était comment les Noëls d'antan ?