Je marchais solo en forêt ce matin, au large de mon patelin. A la sortie du premier bois, avant d´atteindre le suivant (6 à 7 kms), je m´apprêtais à doubler deux connaissances de marche, une vieille dame avec béquille et sa fidèle accompagnatrice, une jeune Roumaine sympa mais qui peine à parler l´allemand, sans oublier le clebs Sami (celui qui m´avait foutu une trouille bleue une fois que je courais et qui n´avait pas aimé que je dépasse sans klaxoner).
On s´est saluées et je m´apprêtais à tracer (au large because Sami) avant que la chaleur matinale ne nous écrase trop. C´est alors que nous avons stoppé net, toutes les trois. Le dog a bondi et la jeune Roumaine a failli faire un double salto avant au bout de la laisse.
Il gisait là, le bébé chevreuil. Assez mal en point. Le Sami était complètement speed. La vielle dame a aussitôt assuré une périmètre de sécurité et m´a demandé aimablement si j´avais une suggestion à faire concernant la suite des opérations...
Après lui avoir concédé que les chevreuils n´étaient pas ma spécialité et constaté à quel point le faon était K.O, j´ai proposé d´appeller le véto d´Ilmmünster, un jeune homme dynamique, énergique, compétent, sympa, un peu le Médecin sans Frontière des bêtes.
- Euh, bonjour Doktor Soffner, c´est moi Agathe. Je suis dans les bois avec deux dames et nous venons de tomber sur un faon mal en point...
- Dans quels bois ?
- Ceux de Reichertshausen (ndlr: une commune voisine de celle d´Ilmmünster)
- Il est comment le bébé chevreuil ?
- Allongé, il bouge à peine. Les yeux un peu entrouverts, sauf le gauche...
- Blessé ?
- Il saigne pas en tout cas...
- Bon, appellez le garde forestier de la commune. C´est de son ressort. Si ca ne va pas, vous me rappelez.
- Ca marche.
Pas un crayon sur moi, rien pour noter. J´avais mon portable, c´était déjà pas si mal. Me voilà en train d´ameuter les renseignements téléphoniques pour qu´ils me mettent en communication avec la commune.
- Bonjour. Je voudrais le numéro du garde-forestier. C´est pour une urgence.
- Ne bougez pas, je vous passe mon collègue.
- Tatan tali tala... Restez en ligne s´il vous plait.... tatan tali tala...
- Allo ?
- Bonjour, je cherche à joindre le garde forestier de Reichertshausen.
- C´est à quel sujet ?
J´ai esquissé la situation. « Non, le petit ne saigne pas. Pas de maman dans les environs ». L´employé de la commune n´était pas franchement aux abois en ce mardi matin et m´a proposé de se charger de joindre le garde forestier, puis de me rappeler.
Dix minutes ont passé...
- Allo, Frau Carré ? Désolé, mais le garde forestier n´est pas joignable. J´ai appelé le commissariat. Un policier m´a dit qu´il passerait peut-être, mais que le mieux serait de remettre le petit où vous l´avez trouvé. La maman viendra bien le retrouver.
- Comment ça « peut-être » ?!!!! Mais les chiens vont le bouffer ! Il est minuscule et ne tient pas sur ses pattes. Au maximum 3 kilos.
- Je suis désolé, mais je ne peux rien vous dire d´autre.
J´ai rappelé le véto qui, toujours aussi adorable (son fils est dans la classe de ma fille et je le croise parfois dans la queue de la boulangerie le matin, toujours charmant même avec les papas et les mamans des bêtes), m´a dit qu´il passerait nous voir quand il en aurait fini avec l´opération en cours.
- J´arrive dans une demi-heure.
- Ok.
Mes deux compagnes, le chien et moi, nous nous sommes dirigés vers le parking du cimetière, là où le doc nous avait donné rencart. On a patienté. Le toutou, nerveux, gémissait sans discontinuer. Je voyais ma matinée filer en fumée, sans que rien n´avance côté boulot...
Quand le doc est arrivé dans son 4x4, j´ai trouvé son sourire beaucoup plus charismatique que dans le cabinet où il triture mon minou une fois tous les six mois... Il a pris le bébé chevreuil et l´a embarqué.
A 16 heures, je l´ai appelé pour prendre des nouvelles. Le petit faon n´a pas tenu le choc. Il est mort une heure après son transport à la clinique.
PS : les personnages et les situations de ce récit n´ont hélas rien de fictif.
On s´est saluées et je m´apprêtais à tracer (au large because Sami) avant que la chaleur matinale ne nous écrase trop. C´est alors que nous avons stoppé net, toutes les trois. Le dog a bondi et la jeune Roumaine a failli faire un double salto avant au bout de la laisse.
Il gisait là, le bébé chevreuil. Assez mal en point. Le Sami était complètement speed. La vielle dame a aussitôt assuré une périmètre de sécurité et m´a demandé aimablement si j´avais une suggestion à faire concernant la suite des opérations...
Après lui avoir concédé que les chevreuils n´étaient pas ma spécialité et constaté à quel point le faon était K.O, j´ai proposé d´appeller le véto d´Ilmmünster, un jeune homme dynamique, énergique, compétent, sympa, un peu le Médecin sans Frontière des bêtes.
- Euh, bonjour Doktor Soffner, c´est moi Agathe. Je suis dans les bois avec deux dames et nous venons de tomber sur un faon mal en point...
- Dans quels bois ?
- Ceux de Reichertshausen (ndlr: une commune voisine de celle d´Ilmmünster)
- Il est comment le bébé chevreuil ?
- Allongé, il bouge à peine. Les yeux un peu entrouverts, sauf le gauche...
- Blessé ?
- Il saigne pas en tout cas...
- Bon, appellez le garde forestier de la commune. C´est de son ressort. Si ca ne va pas, vous me rappelez.
- Ca marche.
Pas un crayon sur moi, rien pour noter. J´avais mon portable, c´était déjà pas si mal. Me voilà en train d´ameuter les renseignements téléphoniques pour qu´ils me mettent en communication avec la commune.
- Bonjour. Je voudrais le numéro du garde-forestier. C´est pour une urgence.
- Ne bougez pas, je vous passe mon collègue.
- Tatan tali tala... Restez en ligne s´il vous plait.... tatan tali tala...
- Allo ?
- Bonjour, je cherche à joindre le garde forestier de Reichertshausen.
- C´est à quel sujet ?
J´ai esquissé la situation. « Non, le petit ne saigne pas. Pas de maman dans les environs ». L´employé de la commune n´était pas franchement aux abois en ce mardi matin et m´a proposé de se charger de joindre le garde forestier, puis de me rappeler.
Dix minutes ont passé...
- Allo, Frau Carré ? Désolé, mais le garde forestier n´est pas joignable. J´ai appelé le commissariat. Un policier m´a dit qu´il passerait peut-être, mais que le mieux serait de remettre le petit où vous l´avez trouvé. La maman viendra bien le retrouver.
- Comment ça « peut-être » ?!!!! Mais les chiens vont le bouffer ! Il est minuscule et ne tient pas sur ses pattes. Au maximum 3 kilos.
- Je suis désolé, mais je ne peux rien vous dire d´autre.
J´ai rappelé le véto qui, toujours aussi adorable (son fils est dans la classe de ma fille et je le croise parfois dans la queue de la boulangerie le matin, toujours charmant même avec les papas et les mamans des bêtes), m´a dit qu´il passerait nous voir quand il en aurait fini avec l´opération en cours.
- J´arrive dans une demi-heure.
- Ok.
Mes deux compagnes, le chien et moi, nous nous sommes dirigés vers le parking du cimetière, là où le doc nous avait donné rencart. On a patienté. Le toutou, nerveux, gémissait sans discontinuer. Je voyais ma matinée filer en fumée, sans que rien n´avance côté boulot...
Quand le doc est arrivé dans son 4x4, j´ai trouvé son sourire beaucoup plus charismatique que dans le cabinet où il triture mon minou une fois tous les six mois... Il a pris le bébé chevreuil et l´a embarqué.
A 16 heures, je l´ai appelé pour prendre des nouvelles. Le petit faon n´a pas tenu le choc. Il est mort une heure après son transport à la clinique.
PS : les personnages et les situations de ce récit n´ont hélas rien de fictif.