7ème jour
Ce matin le réveil sonne avec une demi-heure d’avance… n’ont vraiment encore rien compris à la réception ! Heureusement Kaddour a promis de passer nous réveiller à la bonne heure, nous pouvons replonger dans les oreillers moelleux.
Nous faisons nos adieux à la belle Lijiang pour un départ en direction de Zhongdian à près de 200 km de là, région du Tibet oriental renommée Shangri-La, le « paradis sur terre » depuis mai 2003.
Au bout des 70 premiers kilomètres bien roulants en plaine, nous nous arrêtons d’abord à Shigu (ou Sugu), village à proximité de la première boucle du Yangzi. C’est l’occasion de découvrir la cour d’une maison d’agriculteurs naxis, avec ses meule, pilon, séchoirs à grains…, d’observer le Yangzi depuis la place commémorant simultanément une victoire sino-naxi sur les Tibétains (XVI°s.) et le passage de l’Armée Rouge (XX°s.), et de traverser le temps d’une photo son pont suspendu.Un peu plus au nord, nous déjeunons en bord de route, et nous quittons avec regret le beau, jeune et agréable Chu ; les messieurs ne perdent pas au change : notre guide tibétaine, Animo, est des plus jolies et sympathiques !
Cette route qui monte dans les gorges du Yangzi est à cette époque en plein travaux sur une vingtaine de kilomètres, complètement défoncée, très chaotique, où nous apprécions la dextérité du chauffeur pour éviter les trous ou le précipice et essayer de maintenir une vitesse supérieure à 20 km/h…
Un peu plus haut, nous nous arrêtons à la Gorge du Saut du Tigre où file un Yangzi tumultueux entre les chaînes du Mont Yulong (5596m) et Haba (5396m). Pour atteindre le fleuve-torrent, désescalade et ré-escalade des 500 marches… ou certain(e)s ont pris l’option chaise à porteurs… je préfère mes pieds ! La gorge est ici tellement resserrée que la légende raconte qu’un tigre fuyant un chasseur l’aurait franchi d’un bond pour s’échapper. Une statue féline est enserrée dans une paroi pour matérialiser cette légende. Le fleuve est tumultueux en ce printemps, le site certes touristiquement aménagé, mais quelques pierres glissantes et barrières branlantes peuvent faire craindre la chute mortelle dans l’eau glacée. Pause rafraîchissante, sportive et finalement sympa au milieu de cette journée longue et cahotique de route.
Nous reprenons la route sous un temps pluvieux, sur une chaussée très chaotique et de plus en plus escarpée. Cahotés par le minibus, et bercés par la narration de Kaddour sur le bouddhisme tibétain, nous ouvrons grands les yeux sur ces paysages très alpins de forêts de résineux et quelques feuillus où dévale un petit torrent enserré dans les roches, et la neige de plus en plus proche.
Bref arrêt dans un village Yi très pauvre. Nous n’en visitons qu’une maison, rapidement : le froid, la boue, la présence de moult bêtes à plumes et à poils en ces temps de « grippe du poulet » et autres SRAS terrifiants, et l’anachronisme de notre présence en ces lieux de pauvreté nous rendent vraiment mal à l’aise et nous font abréger notre visite. Animo nous explique que c’est le seul village Yi accessible, les autres étant perdus en forêt, et le dernier village non-tibétain de la région.
Une dizaine de kilomètres plus loin, la vue s’élargit sur un plateau encore jauni par les neiges récentes, éclairé d’un soleil qui perce les nuages de neige, parsemé de barrières de prés et de séchoirs à grains, de troupeaux de yacks et de cochons noirs, de stuppa (ou chörtens). Bref arrêt dans l’un des villages tibétains croisés, avec leurs maisons typiques à deux étages, en bois et briques enduits de blanc et surmontés du classique drapeau.
Shangri-La, le « paradis sur terre », la « terre où règnent la paix et la sérénité » est là, sous nos pieds. Peut-être n’est-il pas nécessaire de pousser jusqu’à Lhassa, à 200 km de là pour accéder aux mystères du Tibet et du lamaïsme… Après neuf heures de trajet (soit une moyenne de 30 km/h), nous atteignons sous un frais soleil Zhongdian et notre hôtel, où nous trouvons du chauffage. La surprise est à la hauteur de notre appréhension passée : Kaddour nous avait fait si peur… (quoique à notre arrivée la fenêtre de la chambre état ouverte et la température devait avoisiner les 0°c !) Dîner à l’hôtel dans un petit salon particulier chauffé (rare dîner où nous pouvons quitter les vestes) et extrêmement bien servi par une jeune fille très attentionnée. En soirée, après les histoires drôles de Jacques, nous nous offrons avec Sophie une séance TV des plus sympas : téléfilm au cœur de la Cité Interdite (trop top : on inventait l’histoire sans que personne ne nous contredise !) et pub chinoises hilarantes.
_________________ "Nous méritons toutes nos rencontres, elles sont accordées à notre destin et ont une signification qu'il nous appartient de déchiffrer." F. Mauriac
Wapiti- Admin
- Localisation : Annecy et Thonon (74) France
par Wapiti Sam 11 Avr - 15:51 8ème jourCe matin, plaisir de découvrir notre premier petit-déjeuner non international mais confectionné de spécialités locales. Si certains restent insatisfaits (Haa, ces Tamalous en voyage !!), les petits pains blancs et beignets vapeur ni salés ni sucrés se laissent très bien manger avec confiture et lait concentré sucré (hou ! il y avait bien longtemps ! ), et quelques pâtisseries et biscuits secs les accompagnent. Enfin des gens civilisés, ces Tibétains ! Ce matin est réservé à la visite de Zhongdian et surtout sa lamasserie de Songzanlin, surnommée « le Petit Potala », aux dimensions imposantes et trônant sur la colline à quelques kilomètres de « la ville ». Fondée sous le cinquième Dalaï Lama (XVII°s.), elle fait partie des 13 plus grandes lamasseries des Bonnets Jaunes et comptait jusqu’à 1600 moines à sa belle époque. Elle en abrite encore aujourd’hui plus de 700. Kaddour aidé de son livre du bouddhisme et Animo vraiment sympathique tentent de nous éclairer toute la symbolique de ce bouddhisme tibétain, ce lamaïsme. Pas facile ! Moulins à prières, statues extérieures et intérieures, tankas et fresques hautes en couleurs exploitent cette symbolique et illustrent la vie du Bouddha. Le chemin du perfectionnement me retiendra un moment… La grande salle des prières aux 108 poteaux est sombre mais colorée, encensée, et quasi-déserte et silencieuse à quelques heures de cérémonies prévues, alors que la cuisine est déjà en pleine effervescence. Photos interdites et/ou ratées... mais on peut en voir de belles là: http://jean.dif.free.fr/Images/Yunan/Zhongdian/5Songzanlin.html Aujourd’hui est jour de fête et nous croisons un certain nombre de pénitents qui font le tour de la lamasserie en priant… debout, à genou, allongés ! Comme toujours ces scènes rituelles de fervente croyance et pénitence, quelle que soit la religion concernée, sont impressionnantes et me laissent perplexe.
Nous sommes encore une fois les seuls occidentaux, et en cette matinée, les seuls touristes ; aucun groupe asiatique en vue et à l’ouïe, un plaisir. Dans les quelques boutiques qui s’ouvrent au pied de la lamasserie, nous faisons des emplettes intéressantes de drapeaux à prière, encens et autres « bouddhismeries ».
On ne peut être qu’hypnotisés par la beauté architecturale des lieux de cultes mais aussi des maisons traditionnelles tibétaines en bois à 2 niveaux, qui n’ont rien à voir avec les constructions chinoises, beauté soulignée ce matin par le ciel d’un bleu très pur et les sommets enneigés environnants.
Je découvre toute cette symbolique lamaïste, je découvre cette architecture et cette décoration typiquement tibétaine, je découvre cette ambiance … toutes ces choses qui m’attirent depuis longtemps sans que je ne les connaisse vraiment. Je découvre, je ne comprends pas tout, mais j’en veux encore.
Retour « en ville » pour parcourir le marché des produits frais aux couleurs sino-tibétaines, om l'on croise vieilles en 'costume' tibétain, bonzes de brun et or, jeunesse occidentalisée... Animo nous fait goûter le baba local et Jacqueline craque pour la galette d’orge encore toute chaude et fumante. Apéritif intéressant avant le déjeuner ponctué de vin local et biscuits achetés par certains ; on semble prendre goût aux gourmandises… L’après-midi est consacrée à une longue balade sur la zone asséchées du ‘lac’ Napa, pâturage d’altitude qui se transforme en un véritable lac en été, ou un marais très fleuri au printemps. En cette fin d’hiver, c’est une vaste étendue jaune où yacks, chevaux, moutons, cochons grignotent quelques brins d’herbe sèche et racines. Les grues à cou noir et des oeis sauvages se laissent observer à distance… un peu loin au goût des photographes. Mais quelle chance de croiser ces migrateurs !
Ciel azur, vent frais hurlant dans les oreilles, Râ chaleureux, grosse bouffée d’air pur et de nature semi-sauvage. Certains trouvent la promenade sans grand intérêt ("assis au chaud dans le minibus, on verrait pareil"), glaciale, trop longue... mais comme Kaddour, je suis subjuguée : c’est vraiment le Shangri-La, « la terre où règne la paix et la sérénité ». Cette balade est bien sympathique et les chaussures me démangent. Ce qu'il me manque dans ce circuit, c'est la possibilité de fouler réellement cette terre, d'en parcourir quelques-uns de ses sentiers, de prendre le temps d'humer cet air, cette ambiance et de m'en imprégner...
En milieu d'après-midi, retour en ville, quartiers libres. Avec Sophie, ce sera une heure de promenade ensoleillée, mais ventée et froide sur la rue principale, Changzheng Lu, alignement de bâtiments bas habités de boutiques de chinoiseries modernes aux sonos hurlantes. Rien à voir avec l’ambiance tibétaine du début de journée. Finalement, il n’y a pas grand chose à faire et voir, nous capitulons et nous réfugions à l’hôtel pour une pause douillette dans la chambre chauffée. En soirée, nous reprenons la route de Songzanlin pour dîner dans un restaurant typique tibétain. Pour la première fois, profusion de viande, notamment du yack, toujours aussi agréable aux papilles. Peu de verdure, mais personne ne s’en plaint tant le cadre est agréable : premier étage en bois sculpté, superbes photos locales au mur, canapés et tables basses, lumières tamisées, brazero… nous sommes seuls, ambiance très feutrée.
Après le dîner, direction la maison d’une famille tibétaine qui nous accueille pour une veillée. En fait, nous nous retrouvons une centaine de touristes dans une immense salle au rez-de-chaussée décorée à la tibétaine, enfumés par le feu, à assister à un spectacle interactif. Accueil avec écharpe, thé tibétain au beurre de yack, orge en graines, poudre et beignets, alcool de riz à profusion. Ambiance très chinoise : sono trop forte et qui tire sur les aigus, « Mme Guy Lux » criant ses commentaires uniquement en chinois entre chants et danses tibétaines. Les touristes sont appelés à participer aux danses… et au milieu de cette populasse chinoise, les frenchies mettent le feu à la piste : nous ne sommes que 8 mais nous faisons remarquer avec notre duo de comiques en J., un french-cancan endiablé ou encore ‘Syracuse’ chantée par notre ténor… Belle soirée, bien arrosée ! Dernière édition par Wapiti le Dim 12 Avr - 9:55, édité 1 fois _________________ "Nous méritons toutes nos rencontres, elles sont accordées à notre destin et ont une signification qu'il nous appartient de déchiffrer." F. Mauriac
Fabricia
- Localisation : Alpes Maritimes
par Fabricia Sam 11 Avr - 16:21 En réponse à :"Comme toujours ces scènes rituelles de fervente croyance et pénitence, quelle que soit la religion concernée, sont impressionnantes et me laissent perplexe."Frédérique, j'ai ressenti ces mêmes émotions lors d'un congrès bouddhiste à Bodhgaya,dans le nord de l'Inde : _________________ Fabricia "Le présent est un leurre puisqu'il se transforme sans cesse en passé" (selon Flora Groult)
Wapiti- Admin
- Localisation : Annecy et Thonon (74) France
par Wapiti Sam 11 Avr - 20:13 A Zhongdian, dans la solitude matinale, par pudeur, nous n'avions pas osé prendre de photos. Merci Fabricia pour cette "illustration" de mon carnet. Tenue vestimentaire légèrement différente, mais même posture, même ferveur. Des kilomètres de distance ainsi, à joindre les mains, à scander des prières, à se courber, s'agenouiller, s'étendre, se relever, rejoindre en deux pas le tissu (rouge ici) et recommencer... _________________ "Nous méritons toutes nos rencontres, elles sont accordées à notre destin et ont une signification qu'il nous appartient de déchiffrer." F. Mauriac
Wapiti- Admin
- Localisation : Annecy et Thonon (74) France
par Wapiti Sam 11 Avr - 21:33 Allez, pour le plaisir des yeux, deux autres liens vers des albums intéressants à feuilleter : - la lamasserie Songzanlin : http://www.globe-trotteur.fr/wordpress/nggallery/page-81/album-2/gallery-28/page-3 - la ville de Zhongdian : http://www.globe-trotteur.fr/wordpress/nggallery/page-81/album-2/gallery-30/page-2 _________________ "Nous méritons toutes nos rencontres, elles sont accordées à notre destin et ont une signification qu'il nous appartient de déchiffrer." F. Mauriac
par Contenu sponsorisé
|