Voilà de quoi t'occuper, pendant ce temps là tu ne penseras à rien d'autre.
Amitiés à bientôt
carmen si ta(quine)
je ne t’ai pas parlé de mon refuge lorrain, au creux des côtes de lorraine d’où, par temps clair, on voit le Donon et les tours de Saint Nicolas de Port…
Entre deux voyages, lorsque l’été s’installe dans ce rude pays qui ne connaît que deux saisons : l’hiver et l’été, j’éprouve un malin plaisir à poser mon crayon au milieu d’un jardin extraordinaire.
Ce n’est pas un jardin, ce n’est pas un patio, plus un espace « entre-deux », empli de verdures où le jardin japonais prend le pas sur le jardin anglais, qui lui-même prend le pas sur le jardin français…
Les ampelopsis rongent trois murs sur quatre, un sorbier aux baies rouges, mais c’est peut-être un alisier tente de prendre le pas sur des fougères presque arborescentes et des rhododendrons têtus…
Plus loin, des hortensias qui seront blancs ou bleus luttent avec des lobelias et des ancholies…
De mes voyages lointains, j’ai ramené des « sceaux de Salomon » qui tâchent de faire bonne figure avec des « désespoirs du peintre »…
Et moi, sur mon caillebotis, la plume à la main, qui tente de rendre les odeurs, les parfums, les couleurs et qui n’y parviens pas…
Heureusement qu’il y a les oiseaux :
Les merles noirs ont fait leur provision tout l’hiver des baies rouges de l’alisier…
Suspendues à deux branches de l’arbre, deux boules de graisse animale, comprimées dans leur tricot de nylon vert, servent de garde-manger aux mésanges, rouge-queue et autres rouges-gorges du voisinage.
Venus de nulle part, mes amis les oiseaux s’approchent parfois de la table où j’écris, pour mendier une miette de pain.
Mais n’est pas moineau qui veut, et leur timidité est à la hauteur des coloris de leur plumage.
Le seul qui soit vraiment perturbé par ma présence, qui empêche ses allers-retours alimentaires : une sorte de « tisserin », mi rouge-gorge, mi-rouge-queue, qui s’est installé dans un nid d’encoignure, entre deux poutres, pour héberger sa nichée de printemps.
Quand je déjeune le matin près de son nid, il vole « en stationnaire », agitant ses ailes minuscules, comme pour me signifier de ses battements d’ailes qu’ici, c’est chez lui et que je n’ai rien à y faire.
Il pousse même l’audace de marquer au sol son territoire de larges tâches blanches…
Un matin, j’ai découvert écrasé au sol, un œuf minuscule, plus petit qu’un œuf de cane, tombé du
nid. Je n’ai plus revu mon « tisserin ».