Et nous reprenons le chemin…
Aujourd’hui, je vous raconte Gauchito Gil ou le syncrétisme religieux.
Mais qui était Gauchito Gil ? Vénéré et adulé avec une ferveur ahurissante par des milliers d’argentins, souvent modestes et avec lequel l’Eglise a composé pour ne pas perdre des ouailles. Jamais sanctifié et pourtant c’est un santo.
On retrouve, du nord au sud, de l’est à l’ouest sur toutes les routes, des autels où volettent des drapeaux vermillon, souvent très laids mais touchants de naïveté.
Un jour, nous roulons tranquillement, bien étonnés d’une circulation totalement inhabituelle sur une « provinciale », quand nous sommes dans un bouchon gigantesque. Des bus, des pick-up, des voitures et des milliers de gens entassés dans la gadoue du bord de la route, sous des auvents de fortune, les fauteuils en plastique, comme les pieds, enfoncés dans la boue.
Gil, né dans la province de Corrientes, autour de 1850, est un gaucho rebelle, le robin des bois de la région.
La guerre fait rage avec le Paraguay et il est enrôlé de force.
Insoumis, il déserte et, rattrapé par la police est condamné à être pendu par les pieds.
Il dit à son bourreau : « tu vas tuer un innocent, quand tu retourneras chez toi, tu trouveras ton fils gravement malade. Alors, prie en mon nom et il guérira » ;
Ce qui est advenu et dès lors, sa légende n’a cessé de croître et les gens confient leur vie à ce santo.
Il est fêté le 8 janvier et, à Mercédes, là où Gauchito est sensé être né,des milliers de gens sont heureux d'être là sous la pluie tiède qui a cessé, serrés tous ensemble au bord du chemin car les marais sont partout dans la région.
L'ambiance est un peu étrange.
L’alcool coule à flots, on entend des rires, des cris, on voit des gens qui remplissent des bouteilles en plastique de l'eau des marais aussi bienfaisante que l'eau de Lourdes.
Les parillas embaument, et curieusement je ne me sens pas tranquille et complètement paumée dans cet imbroglio de voitures, de camions, d'hommes et de femmes saturés d'excitation, dans la boue noire et collante, dans la chaleur humide, au milieu d'une effervescence de drapeaux, statues, de prières.
Un arrêt au mercado du coin ne me rassure guère plus. L'épicerie est entièrement grillagée et la dame sert, par un guichet le produit que l'on souhaite. La caisse est dans un box à côté, grillagé aussi et on laisse glisser la monnaie par une fente.
La jeune femme explique que la région n'est pas sure à cause de la misère.
La pauvreté est ainsi, elle crée des dieux, des saints pour protéger de la ...pauvreté et mieux l'accepter.